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Le Maroc, un pôle de stabilité dans une région en turbulence (Crédit Agricole)

Le Maroc, un pôle de stabilité dans une région en turbulence (Crédit Agricole)

Le Maroc, un pôle de stabilité dans une région en turbulence (Crédit Agricole)

Dans un environnement régional marqué par l’instabilité politique et économique, le Maroc continue de faire figure d’exception. C’est le constat posé par le Département des études économiques du groupe Crédit Agricole France, dans son bulletin d’information publié fin mai 2025. Malgré les chocs successifs – pandémie de la Covid-19, flambée des prix alimentaires et énergétiques liée à la guerre en Ukraine, sécheresses à répétition, séisme –, le Royaume conserve une stabilité macroéconomique remarquable, reposant sur une gestion rigoureuse des équilibres monétaires et budgétaires. L’analyse souligne que le Maroc tire son avantage comparatif d’un ancrage politique solide, d’une gouvernance maîtrisée et d’un attachement profond à la stabilité, perçue comme une composante essentielle de son ADN institutionnel. Alors que ses voisins – Tunisie, Égypte, Algérie ou Libye – sont confrontés à des crises financières, des modèles de développement essoufflés ou des transitions politiques inachevées, le Maroc préserve ses fondamentaux économiques. Le pays est ainsi salué pour la continuité de ses politiques publiques, assurant une résilience face aux aléas.

Mais la résilience a-t-elle un coût ?

Les économistes de Crédit Agricole France posent toutefois une question centrale : cette quête de stabilité macroéconomique aurait-elle freiné le dynamisme et le potentiel du pays ? En comparant les périodes 2004-2014 et 2015-2024, la croissance moyenne du PIB est passée de 4,3% à seulement 2,5%. L’étude évoque un possible «immobilisme économique» induit par la priorité donnée à la stabilité macroéconomique, désormais mis à l’épreuve par les pressions sociales.

Le chômage constitue l’un des points de fragilité les plus marqués. Il a atteint un record de 13,3% en 2024 après 13% un an plus tôt. La Banque mondiale, citée dans l’analyse, rappelle que la population en âge de travailler a augmenté de plus de 10% au cours de la dernière décennie, quand l’emploi n’a progressé que de 1,5%. Ce déséquilibre chronique est accentué par le stress hydrique, qui frappe particulièrement l’agriculture, secteur fortement employeur, notamment de main-d’œuvre féminine.

«Les différents chocs de ces dernières années ont amplifié les pressions. Et en particulier, le stress hydrique y participe largement puisque le secteur agricole détruit plus rapidement les emplois que les autres secteurs, en zones urbaines, n’en produisent. Mais ce n’est, en fait, qu’un accélérateur d’un problème structurel de fond, auquel s’ajoute l’amélioration de la productivité du secteur agricole, qui diminue son intensité en main-d’œuvre, et la transition de l’économie vers les services», estiment les experts du groupe bancaire français.

Des réformes ambitieuses, de premiers signaux encourageants

L’analyse du Crédit Agricole salue néanmoins la dynamique enclenchée par le Maroc avec le lancement en 2021 du nouveau modèle de développement. Ce plan s’attaque aux blocages institutionnels, au climat des affaires, aux barrières à la concurrence, à la qualité des services publics et à la formalisation de l’économie. Les premiers résultats sont perceptibles. L’économie se tourne résolument vers l’export : entre 2021 et 2024, les exportations de biens et services ont représenté en moyenne 41% du PIB, contre 33,5% sur 2016-2020.

Conscient de ses atouts géoéconomiques, le Royaume semble ainsi avoir saisi les opportunités créées par la reconfiguration des chaînes de valeur mondiales, s’affirmant dans des secteurs stratégiques comme l’automobile, l’aéronautique, l’électronique ou les phosphates. Toutefois, ces performances n’ont pas encore d’effet direct sur le front de l’emploi.

Le levier oublié : l’emploi féminin

L’analyse met l’accent sur un levier sous-exploité de croissance et d’inclusion : la participation économique des femmes. Alors même que le Maroc a vu son taux de fécondité baisser et le niveau d’éducation des femmes s’améliorer, leur taux de participation au marché du travail est passé de 30% en 1999 à 19% en 2024 – un des plus bas niveaux au monde. Or, le chômage des femmes, qui dépasse nettement celui des hommes, pèse sur la dynamique économique globale. «Il est donc évident que cibler la problématique du travail des femmes est une des clés les plus efficaces pour traiter celle de la croissance stagnante et du chômage au Maroc», est-il précisé.

L’étude révèle que la destruction d’emplois dans l’agriculture, où travaillent majoritairement des femmes, est rarement compensée par une absorption dans les secteurs urbains, du fait de la ségrégation professionnelle, des contraintes sociales et de l’absence de services adaptés à la parentalité.

Un avant-goût d’une étude de la Banque mondiale à paraître révèle que si 81% des personnes interrogées déclarent soutenir le travail des femmes, ce taux chute à seulement 62% s’il s’agit de travailler tard, 61% après le mariage, 54% sans nécessité financière et 21% lorsqu’elles ont un enfant de moins de 3 ans. Plus frappant encore : si 81% sont favorables au travail des femmes, seulement 56% pensent que la communauté partage leur opinion. C’est donc la perception des normes sociales, plus que les convictions individuelles, qui freine l’emploi féminin. Des campagnes de sensibilisation et des réformes éducatives apparaissent dès lors comme des outils puissants.

L’étude de Crédit Agricole France conclut avec un message positif : les lignes bougent au Maroc. Le pays s’engage dans un tournant réformateur, attire les investissements et valorise ses atouts. La croissance peut repartir à condition d’accélérer les réformes structurelles, notamment celles qui libèrent le potentiel économique des femmes. À court terme, ces mesures sont jugées cruciales pour relancer la création d’emplois.


2025-06-02 16:09:00

lematin.ma

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