Sukuk verts et durables : Le Maroc éligible au nouveau programme de 10 milliards de dollars de la BID

Le Maroc est éligible au nouveau cadre de financements durables du groupe de la Banque islamique de développement (BID). Le Royaume peut ainsi mobiliser des financements auprès de la Banque sous forme de Sukuk verts, sociaux ou durables pour soutenir ses grands projets structurants, en particulier dans les infrastructures et la transition énergétique.

Le Sustainable Finance Framework est un cadre global qui définit les principes, critères d’éligibilité et types de projets finançables par les Sukuk verts, sociaux et durables émis par la Banque. Le montant global des émissions de Sukuk que la Banque peut mobiliser dans ce cadre dépasse les 10 milliards de dollars, qui constituent le plafond programmatique. Ces financements seront alloués aux pays membres de la Banque au cas par cas, selon la nature des projets soumis.

Rappelons qu’à fin 2024, la BID avait émis pour plus de 5 milliards de dollars de Sukuk verts et durables, destinés à des projets climatiques et sociaux dans ses pays membres. Ces financements ont permis de soutenir un portefeuille d’initiatives variées : développement des énergies renouvelables (2.742 mégawatts installés), réduction des émissions (≈411.000 t CO₂ évitées), amélioration de l’assainissement (3,5 millions de foyers), construction d’écoles, routes, soutien aux PME, etc.

Le marché des Sukuk verts et durables est en forte croissance, porté par une demande internationale et des engagements nationaux en faveur de la finance durable. Selon le London Stock Exchange Group (LSEG), son potentiel demeure largement sous-exploité au regard des besoins de financement des Objectifs de développement durable (ODD), mais les initiatives récentes et la mobilisation des acteurs publics et privés laissent présager une accélération significative d’ici 2030.

Concrètement, les projections du LSEG tablent, à moyen terme (2030), sur la mobilisation de 30 à 50 milliards de dollars par an à travers les Sukuk verts et durables. Ces fonds iront au financement de projets et initiatives liés directement aux ODD. De même, le LSEG affirme que l’intégration des critères ESG pourrait ajouter 750 milliards à 1.000 milliards de dollars au marché mondial de la finance islamique dans la prochaine décennie.

Le géant mondial des infrastructures financières et des données fait par ailleurs état d’un gap de financement estimé à 337 milliards de dollars par an pour atteindre les ODD dans 48 pays en développement. Les Sukuk verts et durables peuvent donc contribuer à combler une partie de ce gap.

Notons qu’à fin 2024, le montant total des émissions de Sukuk verts et durables s’élevait à 11,9 milliards de dollars, soit une hausse de 18% par rapport à 2023. Depuis le kick-off de ce marché en 2017, quelque 41,2 milliards de dollars ont été mobilisés à travers ces instruments. Les projections du LSEG pour l’année 2025 tablent sur l’émission de 50 milliards de dollars de Sukuk verts et durables.

En 2024, la BID a mobilisé 464,5 millions de dollars en faveur du Maroc, soit environ 3,52% du financement global approuvé par la Banque (13,2 milliards de dollars). Cela place le Royaume parmi les principaux bénéficiaires, derrière des pays comme l’Égypte (2,13 milliards de dollars) ou le Bangladesh (1,655 milliard de dollars), mais devant des voisins comme la Tunisie (369 millions de dollars).

Depuis 1975 jusqu’à 2024, les mobilisations financières de la BID au Maroc totalisent 7,511 milliards de dollars, soit 3,9% des approbations cumulées du Groupe, qui s’élèvent à 194,8 milliards. Sur ces 7,5 milliards, pas moins de 3,37 milliards de dollars ont été destinés au financement de projets (73 opérations), 4,12 milliards mobilisés en financement commercial (126 opérations), 11,5 millions pour financer des assistances techniques (63 opérations) et 3 millions investis en assistance spéciale (6 opérations).

Ces financements placent donc le Maroc comme partenaire stratégique de la BID, avec un rôle institutionnel clé, une part modérée mais croissante dans les financements et une intégration dans les priorités de résilience et d’innovation. Les financements cumulés soulignent également le partenariat historique entre le Royaume et cette institution, qui planchent actuellement sur le développement d’un nouveau cadre de partenariat stratégique.

Ce dernier sera construit autour des nouvelles ambitions de développement du Royaume, notamment dans la décarbonation de son économie. Des interventions plus ciblées de la BID seront donc consenties dans ce nouveau cadre à signer prochainement entre le Royaume et l’institution.