Digital Maroc 2030 : 250 millions $ de la Banque mondiale pour le Maroc
Les enjeux et les objectifs
Le projet intervient dans un contexte où le Maroc connaît une reprise économique, mais fait face à des disparités régionales, à un décalage entre compétences et besoins du marché, ainsi qu’à un faible niveau de digitalisation des entreprises, en particulier les très petites et moyennes entreprises (TPME). S’ajoutent également les difficultés de création d’emplois, les défis liés aux talents numériques et la nécessité d’accélérer la digitalisation des services publics.
À titre indicatif, le marché du travail souffre d’une inadéquation critique des compétences. Le taux de chômage des diplômés atteint 19,6% et environ 70% des recruteurs en informatique peinent à trouver des talents numériques expérimentés. Le Maroc forme environ 13.000 professionnels du numérique par an, mais 70% cherchent des opportunités à l’étranger, créant une fuite des cerveaux préoccupante.
En outre, les TPME marocaines, qui représentent 99% des entreprises et 72% des emplois formels, restent largement non numérisées, limitant leur productivité. Seul 1% des entreprises sont qualifiées d’entreprises à forte croissance.
Lancée en septembre 2024, la stratégie «Digital Morocco 2030» ambitionne ainsi de relever les différents défis et de positionner le Maroc comme un hub technologique africain majeur. Elle vise à créer 240.000 emplois directs et à ajouter 100 milliards de dirhams au PIB d’ici 2030. Le secteur digital marocain contribue actuellement à 4,5% du PIB, soit environ 7 milliards de dollars, mais son potentiel reste sous-exploité comparé à des pays comme les Philippines qui atteignent 7,4%.
La stratégie s’articule autour de deux axes principaux, trois accélérateurs et deux leviers transversaux. Le premier axe vise à numériser les services publics. Malgré des progrès, le score des services en ligne de l’Indice de l’e-gouvernement des Nations unies a chuté de 0,73 en 2018 à 0,56 en 2024, reflétant des défis persistants d’intégration et de satisfaction des usagers. Le second axe se concentre sur le développement de l’économie numérique. L’écosystème des startups compte 470 startups ayant levé 177 millions de dollars en 2024. Cependant, des enjeux demeurent pour améliorer leur compétitivité, notamment les lacunes réglementaires, l’absence d’une définition officielle de la startup et certaines pratiques de passation des marchés publics. De même, le secteur de l’offshoring subit des pressions croissantes dues à l’automatisation et aux changements réglementaires internationaux.
Concernant les trois accélérateurs, le premier porte sur les talents numériques. Pour atteindre l’objectif de former 50.000 professionnels par an, des mesures supplémentaires sont nécessaires au-delà des initiatives existantes comme Jobintech. Le deuxième accélérateur concerne le Cloud. Le Maroc comptait 12 centres de données en 2025 et le gouvernement développe la stratégie «Maroc Cloud» pour renforcer la souveraineté numérique et attirer les hyper-scalers. Le troisième accélérateur porte sur la connectivité. La fracture numérique persiste avec seulement 4,7% des foyers ruraux connectés à l’Internet fixe contre 36,7% en zones urbaines. Le Maroc se classe 65ᵉ pour les débits mobiles et 101ᵉ pour le haut débit fixe.
Deux leviers transversaux complètent cette architecture. L’intelligence artificielle (IA) constitue le premier levier. Le Maroc, classé 79ᵉ dans l’Indice mondial de l’IA 2024, développe son écosystème en rejoignant l’initiative «Current AI» et en lançant des instituts d’IA. L’usage inclusif représente le second levier. Les femmes utilisent légèrement moins Internet que les hommes (89,3% contre 92,7%) et sont moins familières avec les technologies avancées, un écart aggravé en zones rurales.
Les deux domaines de résultats du programme
Le financement de la Banque mondiale soutiendra deux domaines correspondant aux axes de la stratégie. Le premier domaine accélérera la numérisation des services d’e-gouvernement en modernisant les services publics électroniques, en permettant l’interopérabilité et en adoptant une approche «Cloud First», tout en élargissant le haut débit dans les zones mal desservies.
Le second domaine renforcera le secteur des services numériques en accélérant l’adoption d’outils avancés et de l’IA parmi les startups, les entreprises d’offshoring et les PME, tout en élargissant les compétences certifiées pour faciliter l’intégration dans les chaînes de valeur mondiales.
2025-11-26 14:28:00
lematin.ma



